CAP pâtisserie 2020, un millésime particulier.

CAP pâtisserie 2020, un millésime particulier.

août 29, 2020 Non Par Anne A

Marion est ingénieure des Mines et elle a décidé de passer le CAP pâtisserie 2020, pour un changement de cap professionnel. Mais c’était sans prévoir le confinement. Elle nous explique en quoi consiste cette formation, et pourquoi ce millésime sera différent.

Marion s'entraine pour son CAP
Marion suit ses cours pendant le confinement. © Photo Christophe More

Je prépare le CAP pâtisserie 2020 et je me suis inscrite dans une école à Paris dans le 19e, l’Atelier de Stéphane. J’ai commencé les cours en septembre 2019.

Préparer le CAP tout en travaillant à temps plein, c’est beaucoup de temps et d’énergie. Les cours de pâtisserie et l’atelier déco ont lieu à l’école, tous les mercredi soir de 18h à 22h ou 23h. Tous les week-ends il faut s’entrainer en refaisant toutes les préparations 

Au départ c’est assez frustrant parce que l’on débute, mais au fur et à mesure on voit le côté créatif de la pâtisserie.

C’est aussi un gros investissement financier. Même si le CPF a pris en charge une partie des cours, j’ai dû acheter du matériel et beaucoup d’ingrédients pour refaire les préparations.

Je me suis équipée d’un robot pâtissier KitchenAid et j’en suis très contente. J’ai pris un mini format, car ma cuisine n’est pas très grande. C’est du matériel quasiment pro. Au labo où je suis ils n’ont que du KitchenAid.

J’ai acheté des cercles à entremets, des cercles à tarte, des culs de poule, une mallette de pâtissière, avec une brosse à farine, un rouleau… La brosse à farine sert à éviter de laisser de la farine qui gâche le feuilletage, quand on fait les pliages.

J’ai acheté le pantalon, la veste et les chaussures de sécurité.

Malette professionnelle du pâtissier
La Malette du pâtissier. © Photo Marion Volteau

Tout en exerçant une activité professionnelle à temps plein, vous avez choisi de vous inscrire dans une école, pourquoi ?

J’étais contente de préparer le CAP avec une école, plutôt qu’en candidat libre. C’est un véritable soutien car les professeurs nous montrent beaucoup de techniques, ils nous donnent des conseils. Nous étions 7 par cours plus un commis pour aider le professeur.

On apprend la technique et la théorie.

beau dessert la charlotte
La charlotte de Marion © Photo Marion Volteau

A chaque fois, le professeur nous explique le rôle de la farine, du gluten, l’action de la levure… Cela aide nous à comprendre pourquoi on doit faire les choses, ce n’est pas juste comme çà, il y a des raisons.

La levure, par exemple, ne doit pas être mélangée avec le sel car cela la tue. Elle ne doit pas, non plus, être mélangée avec le sucre parce que cela l’excite et du coup cela supprime les effets de la levure 

Ce sont des choses que l’on ignore face à une simple recette, mais que l’on apprend en faisant une formation. 

Comment se déroule l’épreuve du CAP ?

Cela dure entre 6 heures ½ et 7h, avec ½ h de pause à déjeuner. On nous donne une commande à réaliser, et une thématique :

  • 1 entremet (forêt noire fraisier charlotte)
  • 1 tarte
  • Pâte à choux ou pâte feuilletée
  • Brioche ou viennoiserie

Puis on a 30 mn de questions à l’oral. Cette épreuve théorique exige de lire beaucoup sur de nombreux sujets mais c’est passionnant.

Cette année, les 3 thèmes qui peuvent tomber de façon aléatoire pour l’entremet sont Les 18 ans de Camille ou La magie de Noël ou Les super héros.

Un mille-feuille ou un éclair au chocolat c’est très technique. Une galette des rois c’est plus facile qu’un millefeuille.

Pour la préparation de la commande, il faut penser l’ordre dans lequel on va faire les choses.

Je commence par la viennoiserie parce qu’elle doit reposer pendant 2 heures, puis je mets en cuisson et pendant ce temps-là je prépare ma pâte à tarte.

Fraisier et tarte aux fraises
Fraisier et tarte de Marion © Photo Marion Volteau

On nous donne une commande et il faut l’honorer très précisément, nous n’avons aucun choix. Si on nous dit : 8 pains au chocolat, ce n’est pas plus, pas moins. Il faut donc gérer les quantités.

Il faut que ce soit commercialisable : si on fait une tarte aux fruits, il faut un nappage neutre sinon les fruits vont s’oxyder. C’est plus compliqué pour un candidat libre car ce sont des choses que l’on ne sait pas toujours. A la fin on présente nos réalisations comme si on devait les vendre en boutique.2020 est une année exceptionnelle. C’est la dernière année avant la réforme, il y a donc beaucoup de candidats libres. 

Qu’est-ce qui va changer ?

A partir de l’année prochaine il faudra justifier de 14 semaines de stage en entreprise pour passer son CAP.  La formation se passe sur 1 an et on s’entraine chez soi. Ça va donc devenir plus compliqué.

Dans mon école, ils étudient la possibilité de faire la formation sur 2 ans mais cela demande tout de même 7 semaines de congé par an.

cercles et cornes a pâtisser
Cercles, culs de poule, cornes. © Photo Marion Volteau

2020 est aussi une année exceptionnelle du fait du confinement?

Effectivement, depuis mi-mars nous n’avons plus eu de cours en présentiel, mais l’école assurait des vidéos sur You Tube Live ce qui nous permettait de poser des questions.

Pendant le confinement, cela a été un peu plus compliqué on ne trouvait pas de farine par exemple. Étant donné que je m’entends très bien avec ma boulangère elle m’a dépannée en me fournissant de la farine et de la levure boulangère. J’ai aussi commandé des produits sur internet, mais on ne trouvait pas tout. 

De la farine
Matière première, la farine…© Photo Anne A

Finalement on ne passera pas l’épreuve parce que l’on est en école et ce sera en fonction des résultats du dossier scolaire et de l’évolution pendant l’année. Il y aura validation ou pas du CAP sur la base du livret scolaire, de l’appréciation des professeurs et des notes qu’ils nous ont mises. Les Commissions se regroupent à partir du 4 juillet. Même si mon prof, m’a dit que je n’ai pas trop de souci à me faire sur le dossier scolaire, je suis déçue de ne pas pouvoir passer l’épreuve. Hélas, on doit faire avec les contraintes imposées.

Comment est venue cette idée de CAP pâtisserie ?

J’avais envie de faire quelque chose de créatif, de manuel. Je n’ai plus envie de passer mes journées devant un ordinateur. J’ai envie d’un peu plus de concret, de contacts, de donner plus de sens à ma vie professionnelle. J’ai toujours aimé cuisiner et pâtisser, j’aime vraiment les deux mais je m’éclate plus en pâtisserie.

Le CAP pâtisserie me correspondait mieux, que le CAP cuisine très traditionnel (encore plus que la pâtisserie). J’aime ce qui est précis. Ça me rappelle un peu mes cours de chimie de lycée et de prépa… On peut faire du sucré et du salé en pâtisserie, on peut décliner la pâte à tarte avec plein de choses. En revanche j’aime moins les entremets mais il fallait apprendre. 

Cette formation me donne un cadre : j’apprends les règles de gestion d’un laboratoire (respect des stocks et des quantités), les règles d’hygiène et de sécurité.

Avant de me concentrer sur autre chose, je me suis focalisée sur mon CAP, car c’est un gros investissement en temps et en argent. Je me suis lancée dans l’aventure en me disant que j’affinerai mon projet au fur et à mesure.

Quel projet ?

Je réfléchis à un projet sociétal lié à ce CAP. A cet effet, j’ai postulé chez un incubateur et j’ai été acceptée. Leur prestation consiste en 6 sessions d’une semaine, pendant lesquelles ils accompagnent les entrepreneurs qui ont des projets à but sociétal ou environnemental. J’ai commencé le 6 mai la première session : la conception, le business plan, définir ma cible.

Je vais m’appuyer sur mon CAP pâtisserie pour l’un des versants du projet et je développerai l’autre versant avec l’incubateur qui va m’aider à monter mon business plan.

Préparer le CAP m’a permis d’avoir les bases techniques, de sécurité et d’hygiène aussi.

Râpe Microplane manche en bois
Râpe Microplane © Photo Anne A

Aujourd’hui quel est votre état d’esprit?

J’ai l’impression que les gens préfèrent le salé, ou du moins ils semblent y attacher plus d’importance…

En pâtisserie on ne fait pas de salé, c’est moi qui décline. La pâte sucrée, par exemple, peut se faire en version salée :  on peut faire une pâte avec du parmesan, de la poudre d’amande, des herbes de Provence.

On peut aussi faire des choux salés. Je ne suis pas fan des entremets (forêt noire, fraisier…) mais j’aime beaucoup les choux, les tartes aux fruits.

J’aime faire des viennoiseries, des brioches, c’est très amusant. Une fois la technique maîtrisée, on peut laisser aller son imagination, sa créativité. Je n’aime pas trop les crèmes, à part la pâtissière. Comme la crème chantilly n’est pas trop mon truc alors je fais autrement. 

J’ai encore un peu de mal avec la déco car il faut savoir trouver les bonnes proportions pour que la déco offre un réel apport gustatif. J’essaie d’acquérir les connaissances techniques qui me donnent de l’assurance et me permettront de passer un peu plus de temps sur la déco.

Succès aux pistaches
Succès aux pistaches © Photo Marion Volteau

Dans mon projet, il y a un volet très important sur la partie produit, avec des préparations uniquement à base de produits locaux et de saison. Poireaux, carottes en hiver, tomates en été. Je vais devoir trouver des producteurs adéquats en Ile de France.

Je réfléchis à mes futures recettes, je teste beaucoup à la maison. Je suis vraiment très heureuse de m’être lancée dans cette belle aventure.

Merci Marion pour cet entretien, nous vous souhaitons beaucoup de succès pour l’ensemble de vos projets.

Marion en pâtisserie
Marion continue de s’entrainer pendant ses vacances. © Photo Elisabeth MA

Depuis cet entretien, Marion a obtenu son CAP : 17,5 à l’écrit et 14,5 à la pratique. Félicitations Marion.