Coretta a fêté ses 3 ans, histoire d’un joli succès qui ne se dément pas.
Coretta a fêté ses 3 ans, histoire d’un joli succès qui ne se dément pas.
Rencontre avec Matthieu Marcant et Jean-François Pantaléon.
Matthieu Marcant – Nous sommes 3 associés, Jean-François Pantaléon, Beatriz Gonzalez, chef de Neva Cuisine et moi, Matthieu Marcant. Pour la petite histoire, Beatriz et moi, nous sommes rencontrés à l’institut Paul Bocuse quand nous avions 18 et 21ans. Beatriz a travaillé chez Pierre Orsi, Lucas Carton, Senderens puis à la Grande Cascade ; c’est là que nous avons rencontré Jean-François Pantaléon.
Lorsque nous avons ouvert Neva Cuisine avec Beatriz, Jean-François Pantaléon est venu nous aider pour le démarrage. Ensuite on s’est dit que si l’on ouvrait une seconde affaire on voulait le faire tous les 3. Ce qui fut dit, fut fait.
Jean-François Pantaléon – Notre réussite c’est le fait de notre association. Beatriz et Matthieu avaient de l’expérience, c’est moi qui en avait le moins. Cela m’a rassuré et j’étais convaincu que l’on réussirait tous les 3.
Matthieu Marcant – Je m’occupe de la salle et Jean-François de la cuisine. Nos périmètres sont bien délimités mais on échange beaucoup, on communique sur tout.
Quel est votre parcours ?
MM : J’ai travaillé chez Alain Ducasse, au Scribe avec Alleno, Jean François Rouquette, et au 59 Raymond Poincaré. Ensuite nous avons ouvert Neva Cuisine en 2011, puis Coretta en 2014.
Et vous chef ?
JFP : Je n’étais pas du tout dans le domaine de la cuisine. J’ai fait mon école hôtelière à Nantes et j’ai eu mon BTS à 22 ans. Tout de suite j’ai fait des stages dans les meilleurs restaurants de Loire Atlantique.
A la Grande Cascade, Beatriz était ma chef et elle m’a pris sous son aile. On s’entendait très bien tous les deux. Elle m’a appris beaucoup de chose.
Un rapide passage au Meurice, je voulais voir ce qu’était un palace 3 étoiles.
Ensuite je suis parti chez Apicius, chez Vigato, 2 étoiles, ce restaurant me correspondait très bien : cuisine généreuse, grande brigade mais cool.
Après 2 ans j’ai quitté Apicius car il n’y avait pas de possibilité d’évoluer. Les gens en place se plaisaient beaucoup et n’avaient pas l’intention de bouger. Je pars pour L’Affable, dans le 7e, on me propose un poste de chef. Je ne suis resté que 2 ans car Matthieu et Beatriz m’ont proposé de m’associer avec eux.
Racontez-nous les débuts de Coretta…
MM : Moi j’avais peur au tout début, cela ne marchait pas. On n’avait rien annoncé, on a dit on ouvre la porte comme çà et on voit.
Les 2 premières semaines, c’était difficile. Ce n’est pas un endroit avec une attractivité particulière, en dehors du parc. Il nous a fallu un article de François Régis Gaudry pour décoller, et puis celui d’Emmanuel Rubin…
JFP : Quand on a ouvert ce n’était pas aussi joli ici. On misait vraiment sur l’avenir du lieu. Il manquait aux Batignolles, un restaurant un peu « plus plus ».
Nous proposons des produits de qualité et très travaillés, les portions sont généreuses, le tout pour 41€.
Parlez-nous de votre cuisine et ce qui vous tient à cœur…
JFP – J’aime beaucoup tout ce qui est Asie, j’aime mélanger les produits asiatiques, j’aime beaucoup le gingembre, la citronnelle je suis un fan des condiments.
Je préfère la viande au poisson, je suis chasseur et j’adore travailler le gibier et les sauces. J’ai beaucoup appris à la Grande Cascade pour les sauces. C’était l’école encore classique de la cuisine française. Même s’il n’y avait qu’une étoile on apprenait à travailler plutôt niveau 3 étoiles. De ce fait, en arrivant au Meurice je n’étais pas déboussolé bien que ce soit très rigoureux. Je me trouvais souvent avec 6 ou 7 casseroles de sauces…
Quand vous êtes saucier, vous savez tout faire. Les sauces c’est le plus difficile en cuisine.
Chez Coretta, on fait toujours un très bon jus de viande, une très bonne sauce poisson. On les fait de la même façon que dans les grands restaurants.
MM– On doit essayer de faire des choses un peu originales et se démarquer des autres restaurants. Mais il ne faut pas aller dans l’excès.
Les gens veulent de la nouveauté, ils veulent être étonnés, mais il ne faut pas faire n’importe quoi au nom de l’originalité.
JFP – Certains restaurants prônent les choses très natures, mais je considère que la sauce est le lien entre tous les composants de l’assiette, les légumes et la viande.
Je garde volontairement un peu du classicisme de la cuisine française.
Toute la cuisine nordique par exemple est très minimaliste, beaucoup de cru, c’est plus de la technique que des parfums et des vrais goûts. Les légumes fermentés, très à la mode, on a goûté ces légumes fermentés… bien réalisés, ça va. On a goûté cela au Danemark.
Ma cuisine est assez classique, revisitée juste ce qu’il faut. Ne pas partir dans les excès.
J’aime que la cuisine reste fine, pas pouf pouf… Je suis assez light dans ce que je fais, je ne suis pas un gros mangeur, cela influence ma cuisine. J’aime ce qui est fin.
Comment choisissez-vous vos produits ?
JFP – Nous voulons offrir le choix aux clients, c’est notre vision des choses : on a 5 entrées, 5 plats et 5 desserts qui changent tout au long de l’année et se renouvellent régulièrement, en fonction des saisons, des arrivages.
Nous travaillons avec de nombreux fournisseurs.
On a des très beaux produits qui viennent de ma région la Loire Atlantique : asperges, tomates et petits pois.
Au Croisic j’ai un couple de personnes qui font des algues et des herbes sensationnelles : Les jardins de la mer. Mais ce sont des produits très fragiles, il faut qu’ils arrivent rapidement ici. Les algues meurent en 2 jours.
On achète chez Terroirs d’Avenir surtout des légumes et herbes. Parfois de la viande et du poisson.
Nous travaillons à la fois avec des petits producteurs qui vont nous livrer des produits ponctuellement en fonction de ce qu’ils ont, et avec de plus grosses structures pour assurer la carte quoi qu’il advienne.
MM – On travaille toujours avec les produits de saison, on prend des produits qui sont de qualité. Même si c’est un peu cher. On a des limites de coûts, mais la qualité est notre priorité.
Et pour les vins ?
JFP – c’est surtout Matthieu, mais on aime beaucoup le vin tous les deux. On fait la sélection ensemble, on goûte tous les deux. C’est collégial.
MM – le vin, c’est une passion commune. On adore recevoir les vignerons qui viennent nous proposer leurs vins pour des dégustations. Ce n’est pas le plus mauvais moment de la journée !
On fait aussi des salons, mais principalement, ce sont des dégustations ici.
On implique aussi l’équipe. Ils participent car tout seul on ne fait rien.
Combien êtes-vous chez Coretta ?
JFP – En cuisine, il faut en permanence être 6 minimum mais plutôt 7.
4 personnes en salle, mais comme on est ouvert 7 jours sur 7… nous sommes plus nombreux pour permettre le roulement.
Nous avons une très bonne équipe.
Coretta a déjà 3 ans, quel est votre bilan aujourd’hui?
MM – Coretta c’était à la fois une opportunité et un pari. On est parti de rien, au départ le bâtiment était vide.
Nous avons réussi à faire un beau restaurant moderne et chaleureux, avec beaucoup de bois qui lui donne un petit côté scandinave. Nous avons fait appel à l’architecte d’intérieur Brune de la Guerrande
2 ambiances différentes chez Coretta. En bas pour les aficionados de la cuisine, ils voient le chef travailler. La gestion d’une cuisine avec une équipe jeune et dynamique c’est très intéressant et animé.
En haut c’est plus posé, vue sur le parc.
Avec 80 couverts Coretta est un assez gros restaurant mais nous maintenons l’esprit d’une petite maison dans nos relations avec le personnel et avec nos associés.
Coretta est de plus plus connu et reconnu. Nous avons gagné le prix des restaurant à moins de 50€.
Quel est votre état d’esprit aujourd’hui ?
MM – On ne peut pas faire les choses comme il y a 20 ans.
Quand j’étais enfant et allais au restaurant avec mes parents, les serveurs étaient tous en nœud papillon et veste croisée.
Les mœurs ont vraiment changé, les clients attachent énormément d’importance au décor au cadre et au service, cela devient aussi important que la cuisine.
Dans une boulangerie on reste 3 secondes,
Dans un restaurant on reste 1h30 ou 2h, les gens veulent passer un bon moment, du début jusqu’à la fin.
Il faut tout, la cuisine, le décor, l’accueil.
Pour le moment on veut continuer de bien asseoir les choses. Consolider c’est bien. Rester 30 ans à tenir sa boutique, c’est plus intéressant que d’ouvrir à tout va.
On ne cherche pas à faire des coups d’éclat, mais à bien faire.
Cela ne nous empêche pas d’expérimenter. Cet été par exemple, nous avons fait un partenariat avec Une glace à Paris, les glaces artisanales d’Emmanuel Ryon, MOF glacier.
De 15h à 18h30 on vendait des glaces, 8 parfums au choix, en cornet ou en pot.
Ce sont des glaces un peu chères… mais quand les gens ont goûté, ils reviennent car ce sont des produits de qualité.
JFP – Nous voulons être constants, nous sommes très attentifs à tout.
Nous sommes toujours là sur place… Au minimum, l’un de nous deux.
MM – Les gens aiment bien avoir un référent, ils se disent, tiens on va aller voir untel…
C’est très important. Cela part vite à la dérive un restaurant.
Nous sommes très présents et à l’écoute de nos clients. Nous ne concevons pas les choses autrement.
Nous sommes ouverts toute l’année, 7 jours sur 7 et nous nous mettons en place pour le futur… Quand tout le programme sera terminé sur le parc, ce sera entre 4000 et 5000 personnes qui vont venir travailler tous les jours.
Nous sommes donc assez sereins face à l’avenir.
Merci à Matthieu Marcant et Jean-François Pantaléon pour l’accueil chaleureux que vous m’avez réservé et le temps passé ensemble à tout me raconter… Et surtout merci pour le beau travail que vous faites chaque jour, pour le plaisir de tous.
Il est prudent de réserver …
Restaurant Coretta
151 bis rue Cardinet
Tél : 01 42 26 55 55