Restaurant Au Fil du Zinc, une pépite chablisienne…
Le restaurant, installé dans un ancien moulin, a ouvert en juin 2014. Il entame sa sixième année et affiche complet tous les jours.
Il suffit de goûter la cuisine du chef Ryo Nagahama (passé par Robuchon et Alleno) et l’on comprend tout…
Sans compter la très belle cave (plus de 400 références), domaine et passion de Fabien España, né dans la vigne.
C’est donc ce duo franco-japonais qui tient les rênes de cette pépite chablisienne.
Aujourd’hui c’est Fabien España qui reçoit La Batignollaise.
La Batignollaise – Votre restaurant Au Fil du Zinc a ouvert en juin 2014, racontez-nous comment cela s’est fait ?
Fabien España : Je vends mon restaurant Le Soufflot à Irancy le 28 juin 2013 et je pars pour la saison (juillet et août) à St Julien du Sault…c’est là que je rencontre Ryo.
On s’entendait bien. On se revoit 6 mois après. Ryo avait envie de changer, moi j’étais libre de faire autre chose. Le bâtiment ici était vide, on a rencontré les propriétaires, c’était parti, cela s’est fait tout simplement et naturellement.
Les gens viennent spécialement à Chablis, il y avait donc un potentiel réel.
LB – Quelle est la philosophie du restaurant ?
FE : Jamais de produits japonais toujours des produits français et un maximum de produits locaux.
L’idée au Japon c’est toujours de se rapprocher le plus possible du produit, avoir le goût du produit, le sublimer par une cuisson, une texture, ou une association sobre dans l’assiette.
Un plat de Ryo c’est 2 ou 3 éléments qui marchent bien ensemble. Il n’y a jamais 10 ou 15 éléments par plat, ce qui est un autre style mais ce n’est pas le nôtre.
La carte se renouvelle tous les 15/20 jours. On change une entrée, un plat et un dessert, jamais tout en même temps, on suit la saison. On avait un dessert aux cerises, il n’y a plus de cerises, on crée un autre dessert. On ne fera jamais un fraisier en décembre.
Quand on a ouvert le restaurant, notre leitmotiv fut : « Pas de chichis mais pas de raccourcis ». Je m’explique…
On ne fait pas de découpe en salle, il n’y a pas de nappes, pas de costards… donc une certaine simplicité . Mais il y a un gros boulot derrière dans la cuisine et dans le choix des vins. On est aussi très attentif au choix de la vaisselle et des couteaux, à l’atmosphère, au confort des fauteuils… tout.
Le but c’est que ce soit simple, car pour moi simple c’est vraiment une qualité importante. Bocuse disait : « Le luxe c’est la simplicité »
C’est dur d’être simple. Après s’il y a 2 heures de boulot sur une assiette, c’est notre problème, on s’en occupe, c’est notre métier… les gens sont là pour prendre du plaisir, il faut qu’il y ait une bonne lisibilité dans les assiettes…
LB – Vous avez une démarche responsable et vous travaillez au maximum avec des producteurs locaux. Qui sont-ils?
FE : En effet, Ryo Nagahama choisit de beaux produits et à proximité.
Nous travaillons avec 2 maraîchers, Grèn Sémé à Ligny le Chatel (Grèn Sémé dans l’Yonne Républicaine) et L’aventure au jardin à Noyers sur Serein.
Les agneaux viennent de la Ferme de Clavisy à Noyers sur Serein,On le prend bœuf à la Ferme de Come et les volailles à la Ferme des Chocats à Coulangeron.
Nous achetons notre poisson à Rabaud Raffin une coopérative de petits pêcheurs en Bretagne : que des poissons de ligne, plus de poissons de filet, ainsi qu’à la ferme aquacole de Crisenon à Prégilbert.
Pour les fromages nous nous fournissons chez Sylvain à Flogny La Chapelle… il est doué, il aime ça et il est sympa. Il est à la fois fromager et affineur, ce sont 2 métiers différents.
Le pain qui est servi au restaurant est fait maison. Le blé vient d’à côté, chez Stéphane Billotte.
LB – Vous avez une carte des vins impressionnante …
FE : En effet, on a entre 400 et 450 références, je ne compte plus à vrai dire.
On a une grosse partie de Chablis bien entendu. On va aussi plus au sud en côte d’or, côte chalonnaise, côte mâconnaise, mais on a toutes les régions, Loire, Rhône, Champagne…
On va partout où il y a de jolis vignerons, parfois des choses plus confidentielles, du Jura aux côtes du Marmandais…
LB – Le vin c’est votre passion ?
FE : Je suis issu de la vigne, ma famille est à Irancy depuis plus de 400 ans.
Mon grand-père maternel avait confié le domaine familial à mon oncle, l’aîné de ses deux enfants. Maintenant que mon oncle ne travaille plus, c’est mon cousin (son fils) qui a pris la suite. Ses vins sont à la cave de vieillissement, c’est du 2017, on le sortira quand çà goûtera bien.
J’ai donc beaucoup travaillé dans les vignes, je préférais cela à l’école…
Tous les mardi et mercredi, je pars à la rencontre des gens avec qui on travaille depuis longtemps et à la découverte des nouveaux…
Quand je vais dans un domaine, même si chaque vigneron à son style et sa méthode, je suis en terrain connu. Je sais de quoi je parle et souvent cela plait aux vignerons.
LB – Comment gérez-vous la cave ?
FE : Il faut aller dans les vignes à la rencontre des vignerons, pour découvrir leurs vins, les déguster et les sélectionner.
Actuellement, c’est la période où l’on ne déguste pas. On reprendra çà après les vendanges à partir de novembre jusqu’à fin avril.
Il y a des vins qui plaisent beaucoup, d’autres moins, il faut savoir choisir.
Il faut connaître ses clients : qui veut quoi, à quel moment… Est-ce que le client veut mettre 30€ dans une bouteille, est-ce qu’il veut en mettre 300 ? Savoir ce que le client a envie de boire… C’est le boulot du sommelier tout cela.
Tous les vins qui figurent à la carte ont été sélectionnés parce que je les ai aimés. Les vins c’est du vivant, il y a des moments où ils se goûtent mieux que d’autres, donc c’est à moi de suivre, de tout le temps goûter et de me dire tiens çà c’est bon en ce moment, ça on va attendre un petit peu…
Ce sont des vins que l’on va vendre ensuite, dont il faut savoir mesurer si on peut les boire tout de suite, ou s’il faut les laisser vieillir… Les vins, je les cherche, je les déguste et je les sélectionne tout au long de l’année.
Je fais cela comme un joueur de foot tape dans un ballon.
LB – 5 ans déjà, depuis l’ouverture de votre restaurant Au Fil du Zinc. Vous faites quel bilan ? Quels sont vos projets ?
FE : Nous n’avons jamais cherché à communiquer particulièrement et le démarrage a été relativement aisé car nous avons une grosse clientèle locale.
Du 15 juillet au 15 août la tendance s’inverse un peu car nous avons davantage de « touristes » et la clientèle locale part en vacances.
En avril 2017 nous avons aussi ouvert Les 3 Bourgeons : 50% de la carte est orientée sur les produits régionaux mettant la cuisine bourguignonne à l’honneur. Le reste de la carte évolue en laissant le champ libre à la créativité du chef Takeshi Otomura.
En salle c’est Yu Yokoyama. Ce sont deux anciens de chez nous, Ryo les connaissait très bien, car ils étaient tous les trois à l’école ensemble.Ils sont venus travailler chez nous dans l’optique d’ouvrir le prochain restaurant, le temps de vérifier si tout le monde s’entendait bien…
Ils ont travaillé pendant 1 an ½ avec nous, puis on les a installés à côté. Mais c’est leur restaurant, c’est chez eux. Ce sont deux restaurants différents.
Au Fil du Zinc est ouvert du jeudi au lundi et Les 3 Bourgeons, du mardi au samedi, fermé dimanche et lundi. Comme çà il y a toujours au moins un restaurant ouvert sur les deux.
Je reviens sur Au Fil du Zinc… on est complet tout le temps, on fait ce que l’on veut et ce que l’on aime. On a une équipe jeune (moyenne d’âge 27 ans), très investie et stable, 6 personnes en cuisine et 3 en salle.
Les clients sont contents… Mais on ne veut pas s’endormir, on doit continuer de chercher, de s’améliorer.
Il ne faut jamais se croire arrivé dans ce métier. A chaque service on repart à zéro.
On ne fait rien de vital, on veut rester simple mais on donne le meilleur de nous-mêmes pour que le client reparte satisfait et heureux…
Les gens qui viennent et reviennent, c’est notre plus belle récompense.
Merci à Fabien España et au chef Ryo Nagahama pour leur accueil et le joli travail accompli chaque jour pour notre plaisir à tous.
Il est plus que prudent de réserver.
Le menu au déjeuner (entrée, plat et dessert) est à 33€ et 37€ au dîner.
Le menu dégustation en 5 services à : 48€
Et celui en 7 services à : 62€
Si vous venez pour la première fois, le menu dégustation en 7 services vous permet de découvrir au mieux la cuisine du chef Ryo Nagahama et d’éviter la difficulté du choix sur une carte aussi tentante. Le rapport qualité prix est excellent.
Au Fil du Zinc
18 rue des Moulins
89800 Chablis
Tél : 03 86 33 96 39
Ouvert tous les jours sauf le mardi et le mercredi.
Déjeuner : 12h15/13h
Dîner : 19h15/20h30